HONET
Interview with the French street artist

Honet brings French street art at its best

According to me, Honet is simply the best French graffiti artist ever.
I did this interview in French back in the days for a magazine called BPM.
More about HNT.

Portrait of Honet painting live

Portrait of Honet painting live

Vers le milieu des années 80, les premières pierres du graffiti sont posées par des rockers, skins et autres punks dans un Paris aux accents sauvages. C’est dans ce contexte que débarque Cédric en 1989. Pour combler son ennui à l’école, ce jeune Parisien décide d’accompagner quelques amis dans les tunnels du métro pour y peindre ses premiers personnages, goûtant au plaisir de pouvoir “faire des conneries en groupe.” Un an plus tard, la Zulu Nation d’Afrika Bambataa arrive en France. Ce mouvement dont la philosophie est basée sur le respect prend position contre les tags. C’est justement à cette époque que Cédric commence à poser les siens, “histoire de faire chier et de pourrir les murs avec des trucs bien dégueulasses.” Il devient alors Honet, un nom choisi comme une provocation pleine d’humour à une époque où la tendance dans le milieu est aux noms hardcore, de Nique ta mère à Crime Time Kings.

Huge street painting by Honet

Huge street painting by Honet

DES TRAINS AUX MURS
Honet deviendra peu à peu un activiste respecté du “trainisme” hexagonal (l’art de peindre sur des trains, ndlr). Depuis ses premières armes sur la ligne du RER A avec les DKG jusqu’aux métros de Barcelone avec les SDK (crews de graffeurs français), il peindra tous les supports que les voies ferrées d’Europe auront à lui offrir.
Quelques années plus tard, le graffiti explose et de plus en plus d’artistes de la bombe passent leurs nuits à défoncer des wagons. Honet recherche l’originalité, mais sortir du lot devient alors plus difficile. “Lorsque ta peinture n’est jamais qu’une de plus au milieu de 500 000 autres, et que tu es noyé sous une masse de jeunes de douze ans qui peignent dix fois plus que toi et qui apprennent dix fois plus vite, c’est logique” explique l’artiste. En parallèle, il développe donc un nouveau style, plus personnel, plus simple et efficace en abandonnant les lettrages du métro au profit de formes figuratives épurées qu’il commence à peindre dans la rue. Honet devient alors HNT.

Honet street art in Paris

Honet street art in Paris

POLITIQUE ET POLEMIQUES
Motivé par un revival visionnaire des années 80, il détourne l’esthétique communiste pour peindre des Redskins stylisés en noir et blanc, qui seront son premier véritable thème de prédilection. Skinheads proches de la classe ouvrière et du mouvement punk, les Redskins sont traditionnellement engagés dans des luttes anti-racistes. La motivation de Cédric est cependant liée à l’aspect graphique, et complètement apolitique. Il explique : “Mes grands-parents étaient communistes et j’ai baigné dans cet univers que j’ai retranscrit en jouant avec les faucilles et les marteaux à la manière de logos.” Mais si le grand public de l’époque ne comprend pas forcément toutes ces subtilités et se contente souvent de le prendre pour un fasciste vandale, cela ne lui pose pas de problème particulier. “Plus il y avait de vagues et de polémiques autour de mon travail, plus j’étais content” dit-il, “car le but reste avant tout de faire parler de soi.” Cela commence à le déranger davantage lorsqu’il réalise que la plupart de ses amis sont des Redskins qui ont été interpellés par son travail et qu’il est en train de s’enfermer dans une catégorie sociale et culturelle.
Quand quelques années plus tard les jeunes graffeurs arrivent à leur tour dans la rue avec de nouveaux supports d’expression comme les stickers ou les affiches, Honet retourne à ses premières amours et recommence à peindre dans le métro. “Je m’efforce d’être là où l’on ne m’attend pas et de surnager à contre-courant des modes et des tendances” confie-il. S’il lui arrive aujourd’hui d’exposer dans des galeries, cela ne change en rien le sens et la valeur de son travail. Exigeant sur le choix des lieux, il n’accepte les projets qu’au coup par coup, et ne voit dans ce nouveau médium de l’art qu’une prolongation de son activité dans la rue. “Que je peigne dans la rue ou dans une galerie, je ferai toujours du graffiti, l’art contemporain ne m’intéresse pas. Je suis simplement content de pouvoir m’ouvrir à un nouveau public.”

Honet graffiti

Honet graffiti

NEW WAVE ET ETHNOLOGIE
Plus que dans les musées ou dans l’art contemporain, Cédric puise l’essentiel de son inspiration dans la musique. Il se retrouve dans l’ambiance des années 80 “où écouter du punk et du rap revenait à la même chose et où les skins étaient encore des racailles de banlieue.” Dans les années 90, il découvre les premières raves et le mouvement hardcore. Et raconte : “Je suis fasciné par ce phénomène qui consiste à se regrouper autour d’une passion commune pour un genre musical et à essayer de retranscrire cela dans des codes vestimentaires particuliers. J’ai toujours été un véritable fétichiste du vêtement. Je me reconnaissais dans le mouvement des free parties avec ces gens qui étaient habillés comme moi en treillis et avec ce côté illégal dans les forêts la nuit. Je ne me retrouvais pas dans le hip-hop et les baggies XXL inconciliables avec la pratique du graffiti.” Aujourd’hui, même si Jean-Pascal a porté un jour un tee-shirt Honet sur le Prime Time de la Star Academy (véridique !), ses influences se situent dans la New Wave et dans l’électro influencée par les 80’s, avec des labels comme Gigolo ou Leitmotiv.
Il aime fréquenter le microcosme parisien branché des dj’s et des soirées pour mieux en comprendre les attitudes et les codes vestimentaires. “J’ai toujours aimé m’immiscer dans des petits groupes sociaux pour les étudier et les analyser. C’est chaque fois une nouvelle aventure, comme un voyage avec la frontière qu’il faut réussir à passer pour ensuite arriver chez l’habitant et découvrir ses us et coutumes. Ensuite je retranscris ces éléments dans ma peinture.

Honet wall painting for an exhibition

Honet wall painting for an exhibition

“NOUS SOMMES TOUS DES EUROPEENS”
Honet ne fait pas du graffiti français mais du graffiti européen. Il a toujours beaucoup voyagé, explorant les moindres recoins de l’Europe, arpentant les dépôts de trains ou les galeries de Barcelone à Bratislava. Les nouveaux acteurs de la discipline qui commencent à apparaître dans les pays de l’Est sont pour lui autant de sources d’inspiration et de motivation. “Chaque continent a une identité propre, des États-Unis qui représentent le passé jusqu’à l’Amérique du Sud qui possède sa propre culture et donc un style vraiment particulier. En Europe il y a énormément de styles et pourtant les frontières restent floues car les gens voyagent beaucoup et parfois il est difficile de savoir si quelqu’un vient de Hollande, d’Allemagne ou de Suisse.” Il découvre lors de ses expéditions une ouverture d’esprit et une acceptation qu’il ne trouve pas en France où les gens restent encore majoritairement fermés à la nouveauté. “Un de mes combats de toujours est d’essayer de faire chier ces gens sectaires qui ne croient que dans le passé. Une de ces personnes est d’ailleurs venue me voir un jour pour me dire que j’avais “détruit le graffiti à Paris avec mon style chelou”. Je crois que c’est un des meilleurs compliments que j’ai reçus…” Ne cherchez pas Honet là où vous l’attendez, il n’y sera pas !

Honet artwork printed on a bag

Honet artwork printed on a bag